L’Invasion britannique par David Patrick Geggus
Geggus est professeur d’Histoire University of Florida. Il a écrit plusieurs livres sur la Révolution haïtienne dont Slavery, War and Revolution: The British Occupation of Saint Domingue, 1793-1798)/ L’Esclavage, la guerre et la Révolution : l’Occupation britannique de Saint Domingue, 1793-1798 (1982) et Haitian Revolutionary Studies / Etudes révolutionnaires haïtiennes (2002).
Quand la République française déclara la guerre à l’ Angleterre en 1793, les Britanniques virent juste une opportunité pour faire main basse sur la plus riche colonie de la Caraïbe et l’ajouter à leur empire. Pendant cinq ans, jusqu’en septembre 1798, les troupes britanniques occupèrent la plus grande partie des côtes occidentales de Saint Domingue et la pointe de la péninsule du Sud autour de Jérémie. La classe des planteurs accueillirent les Britanniques en protecteurs de leurs propriétés ravagées par la révolution des esclaves venant du nord. Parmi ces envahisseurs, il y avait des gens de couleur libres et riches, tout comme des conservateurs royalistes et des anglophiles libéraux. A peu près 20, 000 soldats britanniques et quelques milliers de mercenaires allemands servirent dans la colonie. 60 pour cent d’entre eux y périrent, habituellement de la fièvre jaune quelque mois après leur débarquement. Contrairement à l’expédition de Leclerc, ils arrivèrent par groupes séparés, épars et non durant la saison saine. Pour compenser la situation, les Britanniques recrutèrent au moins 7, 000 esclaves comme soldats, un modèle qui serait adopté très tôt ailleurs. Ensemble avec la milice locale, toutefois, ils ne purent grand-chose contre les forces d’André Rigaud et de Toussaint Louverture. Au milieu de 1796, le gouvernement britannique reconnaît qu’il ne peut gagner, mais seulement tenir pour deux années ou plus, craignant l’impact qu’un repli puisse avoir sur les esclaves dans les colonies britanniques. A Jérémie et à l’Arcahaie, l’esclavage continuait comme avant, mais dans le reste de la zone occupée, le régime de plantation sombrait dans une guerre de position et d’embuscades. Le haut coût de l’occupation, empiré par la corruption et le gaspillage, finalement força le gouvernement à accepter l’évacuation.
La révolution eut à diviser, géographiquement et politiquement la puissante population de couleur libre et à intensifier la militarisation, et par conséquent la montée au pouvoir des anciens esclaves.
La proclamation montrée ici est publiée par Toussaint Louverture comme il concluait les négociations pour l’évacuation des troupes britanniques. Il promet de la protection aux colons qui avaient collaboré avec les Britanniques s’ils restaient à Saint Domingue. Dans ce texte, Toussaint a outrepassé ses pouvoirs comme Gouverneur colonial, dans la mesure où l’émigration en territoire ennemi était une offense capitale pour les citoyens français. Cet acte d’autonomie illustre l’humanité de Toussaint et sa vision multi raciale pour Saint Domingue. Mais ce fut aussi une façon d’accumuler les otages qui puissent lui servir pour dissuader la France de toute tentative future pour le renverser.
Cette carte de Port–au– Prince, dessinée par Billiot Jeune, date de juste après le repli britannique. Elle montre les travaux de défense construits par les envahisseurs, incluant le Fort national qui survit encore de nos jours, tout comme les noms coloniaux et révolutionnaires de plusieurs rues.