Boyer,  les abolitionnistes européens et les  Afro – Américains  par Alyssa Goldstein Sepinwall

Sepinwall est professeur d’Histoire à California State University, San Marcos. Elle est  l’auteure de Haitian History: New Perspectives/ Histoire haïtienne : nouvelles perspectives (2013) et de l’Abbé Grégoire and the French Révolution /  L’abbé Grégoire et la Révolution française (2005).

Jean Pierre Boyer devint président de la république du sud d’Haïti après la mort d’Alexandre Pétion en 1818.  En 1820, à la  suite du suicide du Roi Henri Christophe, les forces de Boyer occupèrent le nord et réunifièrent Haïti. Comme il le fut pour Pétion  et Christophe, l’un des plus grands défis que Boyer dut affronter  fut l’isolation d’Haïti, vu que les autres pays refusèrent de reconnaître  son indépendance. En 1814, Pétion et Christophe avaient chacun reçu des émissaires de la part de Louis XVIII de France. Ces émissaires  tentèrent de persuader les dirigeants haïtiens  que leurs libertés seraient respectées s’ils  rejoignaient  l’empire français.   
Les négociations échouèrent quand  le plan de l’envoyé de  Louis XVIII  Dauxion – Lavaysse de reconquérir Haïti fut découvert. (Voir procès verbal des séances plus bas). 

Durant sa présidence, Boyer prit plusieurs initiatives en vue de diminuer l’isolation diplomatique d’Haïti. Il écrivit aux abolitionnistes comme le prêtre français Henri Grégoire, cherchant  leur amitié et conseils. Boyer et ses aides  sollicitèrent à Grégoire  de devenir un défenseur d’Haïti et ils lui  proposèrent  de devenir évêque catholique, (ce que n’approuva pas le Vatican, vu qu’il n’avait pas de relations avec Haïti).  Alors que Grégoire déclina l’invitation, il  fut néanmoins désireux de servir  comme  conseiller étranger à Haïti, offrant des conseils au gouvernement haïtien sur les points de la politique, de la religion et de la moralité. (Voir par exemple : Grégoire : De la liberté de conscience et de culte à Haïti).  
  
​En 1825, la France reconnut finalement l’indépendance d’Haïti. Toutefois, les Etats-Unis continuèrent de refuser d’établir des relations diplomatiques avec Haïti. Au début et au milieu des années 1820,  Boyer lança une initiative en vue  de renforcer les liens avec les citoyens américains et pour aider à populariser sa république. Articulant un puissant message de solidarité  panafricaine, il envoya des représentants aux USA, encourageant  les Afro – Américains à s’établir en Haïti (voir sources plus bas). Beaucoup de noirs libres aux USA répondirent à l’appel de Boyer. Haïti, qui s’était battu si héroïquement pour renverser l’esclavage et gagner son indépendance sembla  un bastion de la liberté des noirs. Ils s’y rendirent en espérant trouver une  issue par rapport au racisme américain. A peu près 13, 000 Afro – Américains émigrèrent vers Haïti  dans les années 1820. Toutefois, les conditions  là-bas n’étaient pas  ce qu’on leur avait promis. Ils avaient espéré travailler comme marchands ou artisans, mais ils furent forcés de travailler comme cultivateurs sur les plantations. Désillusionnés, la majeure partie retourna aux USA. En dépit  de l’échec à cour terme de cette tentative, le mouvement de l’émigration vers Haïti, débuté en 1820, procura la scène pour un rapprochement entre   les Afro – Américains et Haïti. L’histoire du projet  de l’émigration sous Boyer  est aussi entrée dans la chanson. Cette  chanson, d’abord écrite par des blancs américains racistes pour ridiculiser le mouvement d’émigration, est devenue une chanson classique dans les livres de chansons américaines dans le cadre d’une version modifiée composée par  Aaron Copland.