Soulouque et Geffrard  par Antoine Michel

Un extrait du texte Avènement du général Fabre Nicolas Geffrard à la présidence d’Haïti (1932) de Michel. Michel était un intellectuel et historien haïtien. Comme Louis Joseph Janvier, il était un noiriste qui croyait que des mulâtres tels que Fabre Geffrard avaient exploité des noirs tels que Faustin Soulouque à travers l’histoire haïtienne. Avec un ressentiment amer, Michel a décrit comment Geffrard et son lieutenant Fils-Aimé ont trahi Soulouque et ont saisi le pouvoir.

N'ayant pas oublié les faveurs que [Soulouque] et l'Impératrice lui avaient accordées, le Président Geffrard promit qu'il n'arriverait aucun mal à Soulouque ni à aucun des membres de sa famille. Geffrard confia Soulouque au général Fils-Aimé et lui demanda de veiller à ce qu'on ne touche pas un cheveu de sa tête.

Escorté par détachement d'infanterie de la garde républicaine sous les ordres du général Fils-Aimé et accompagné de plusieurs de ses anciens généraux et officiers, l'Empereur fut amené à pied de sa maison de la Rue de la Réunion jusqu'au Consulat français à l'angle des rues Bonne-Foi et Magasin de l’État…

Obéissant aux ordres du général Fabre Geffrard, le général Fils-Aimé se rendit au Consulat français pour délivrer la lettre d'abdication de [Soulouque], probablement écrite par D[amien] Delva et signée par l'Empereur …. Voici ce que disait cette lettre : "Haïtiens, appelé par la volonté de mon peuple à gouverner les destinées d'Haïti, tous mes soins et tous mes efforts ont constamment tendu à assurer le boheur de mes concitoyens et la prosperité de mon pays. Je conserve l'espoir de ne pas perdre l'affection de ceux qui m'ont élevé au pouvoir, mais les événements qui viennent de se produire ne me permettent plus de douter des véritables sentiments de la nation. J'ai trop d'amitié pour mon pays pour hésiter à me sacrifier pour le bien de tous, J'abdique, et je ne forme qu'un seul voeu, c'est qu'Haïti puisse être aussi heureuse que mon coeur le désire."

Le général Fabre Geffrard se rendit à l'église et assista à un Te-Deum… Il prononça un discours qui expliquait le but et les grands principes de la Révolution. Après la cérémonie religieuse, il fit le tour de la ville, dont certaines maisons arboraient des drapeaux blancs. Puis il retourna au Palais Impérial.