Elie Dubois  et  lEducation des femmes  par Madeleine S. Bouchereau (1905- 1970)

Un extrait de l’Education des femmes en Haïti (1944) de Bouchereau. Madeleine Bouchereau fut co-fondatrice de la Ligue Féminine d’Action Sociale en Haïti. Tandis qu’elle reconnaissait les contributions réalisées par Elie Dubois, Bouchereau explique que l’école réaffirmait la doctrine de la séparation des sphères privée et publique, et préparait les jeunes femmes à une vie de soumission domestique.

En 1859, il y avait 49 écoles primaires de garçons, deux écoles de demoiselles et trois lycées. Toutefois sous l’impulsion du gouvernement du Président Geffrard, avec le ministre Elie Dubois à l’instruction publique, le nombre des écoles augmenta considérablement. En octobre 1861, il y avait deux cent quarante-deux écoles du gouvernement.

De plus, des jeunes gens furent envoyés à l’étranger pour poursuivre leurs études aux frais de l’Etat. Naturellement ces bourses destinées à la formation des futurs dirigeants ne furent pas données aux jeunes filles. Toutefois les parents riches commencèrent à prendre l’habitude d’envoyer en France leurs enfants des deux sexes pour y parfaire leur éducation. Les filles étaient envoyées le plus souvent dans les couvents et y recevaient l’éducation donnée à cette époque aux jeunes filles françaises. La nouvelle loi de 1860 permit au gouvernement d’établir d’autres pensionnats de demoiselles dans les chefs-lieux d’arrondissement... Dans les écoles primaires de jeunes filles, l’enseignement comprenait l’instruction élémentaire et l’éducation professionnelle: «Instruction élémentaire: lecture, écriture, géographie d’Haïti. Education professionnelle: la couture à l’aiguille et à la mécanique, le tricotage et la broderie.» Dans ces écoles, le matin était consacré aux classes et l’après-midi aux travaux manuels.

Dans un rapport d’Elie Dubois au Président en mars 1860, il déclare: «Les écoles de demoiselles, fondées en cette ville, réunissent toutes les conditions nécessaires pour qu’on y reçoive une bonne éducation. Confiées à la direction de dames habiles et respectables, pourvues de professeurs instruits, elles ne peuvent manquer d’atteindre le résultat que le Gouvernement s’est proposé en les établissant. On s’y occupe de couture, de broderie, de travaux à l’aiguille de tous genres. Ces travaux sont de la plus grande importance, si on considère que ces jeunes demoiselles qui recevront une instruction en rapport avec leurs besoins seront appelées un jour à pourvoir par elles-mêmes à leur existence matérielle.» Par ce rapport, nous voyons que les idées de Fénelon et de Rousseau avaient cours en Haïti et que les écoles de filles étaient censées préparer les femmes à leur rôle futur. Les travaux essentiellement féminins: couture, broderie, continuent jusqu’à présent à occuper un temps exagéré dans les écoles de filles au détriment des matières classiques.

Grâce à la signature du Concordat avec le Saint  -Siège en 1860, les ordres religieux catholiques commencèrent à occuper une place importante dans l’éducation de la jeunesse haïtienne. A partir de cette époque les couvents vont jouer en Haïti le même rôle qu’en France.

Les Sœurs de St-Joseph de Cluny arrivèrent en Haïti au nombre de quatre le 5 juin 1864.

Les Filles de Sagesse ont fondé leur première école à Port-de-Paix le 11 novembre 1865.

Ces écoles, entièrement dirigées par des Françaises, ont contribué à maintenir en Haïti les méthodes françaises et le type d’enseignement traditionnel donné dans les couvents.