La Migration afro – américaine vers Haïti par Matthew Clavin
Clavin est professeur d’Histoire à University of Houston. Il est l’auteur du livre Toussaint Louverture and the American Civil War: The Promise and Peril of a Second Haitian Revolution / Toussaint Louverture et la Guerre civile américaine : la promesse et le péril d’une seconde Révolution haïtienne (2010).
Durant la plus grande partie du dix-neuvième siècle, Haïti était devenu un [motif] d’espoir pour les Afro- Américains aux Etats Unis. Conséquemment, plusieurs mouvements émergèrent pour l’installation des esclaves noirs américains libres dans la nouvelle nation indépendante. La première, qui débuta à peu près une décennie après l’Indépendance haïtienne, a connu seulement un succès limité, de la même façon qu’elle eut à faire face à une forte opposition de la part de ceux qui encourageaient les esclaves à rester et se battre pour leurs droits civils aux Etats Unis. Des dizaines d’années après, les mouvements d’émigration vers Haïti reprirent dans la mesure où beaucoup d’Afro-Américains se trouvèrent de plus en plus frustrés avec les dispositions du gouvernement américain à la fois de renforcer l’esclavage et la suprématie blanche. Conduit par les leaders religieux et politiques noirs comme Martin Delany et James Théodore Holly, et l’abolitionniste blanc radical James Redpath, ce nouveau mouvement gagna une grande popularité parmi les Afro-Américains à la fois aux Etats Unis et au Canada.
Comme résultat de ces deux mouvements, peut – être à peu près 20 % de tous les noirs libres dans le nord des Etats- Unis émigrèrent vers Haïti dans les quatre décennies avant la Guerre civile. Même Frederick Douglass, l’ancien esclave [fuyant] et depuis opposant à la colonisation, considéra son émigration éventuelle vers Haïti. Au printemps de 1861, il envisagea de voyager vers la nation insulaire [Haïti] en vue d’explorer les perspectives comme une destination pour les émigrants noirs. Mais l’éclatement de la Guerre civile l’empêcha de réaliser le voyage.
L’émigration vers Haïti n’avait pas comblé les attentes. En effet, la majeure partie de ceux qui avaient émigré d’Amérique du Nord vers Haïti étaient retournés [en Amérique]. L’assimilation dans une Haïti francophone, catholique, avec une culture tropicale montrait assez de difficultés extraordinaires pour des protestants anglophones habitués à des climats tempérés du nord des Etats-Unis et du Canada. Néanmoins, leur désir de faire d’ Haïti leur refuge témoigne de l’ existence d’ une identification raciale puissante centrée dans la Mer des Caraïbes qui traverse l’Océan atlantique et qui relie tous les hommes et toutes les femmes descendant d’ Afrique.