Louis-Joseph Janvier et les Nationalistes par David Nicholls (1936-1996)
Un extrait du livre de Nicholls From Dessalines to Duvalier: Race, Colour and National Independence in Haiti / De Dessalines à Duvalier : race, couleur et indépendance nationale en Haïti (1979). Nicholls était un révérend [pasteur] et un historien. Dans cette étude fondamentale, il insista sur le fait que les divisions de couleur ont caché les autres divisions comme l’on constate dans l’histoire politique d’Haïti.
Les années suivant la chute de Geffrard en 1867 ont vu une polarisation entre les élites noires et mulâtres et leurs manifestations en deux groupes politiques, le Parti à prédominance mulâtre ou Parti Libéral et le Parti à prédominance de noirs ou Parti National. Durant les années 1870 et 1880, ces deux partis se battirent pour la suprématie dans les champs électoral, militaire et intellectuel.
Quoiqu’on ne puisse dire que le Parti National ait tenu un discours idéologique cohérent, ou encore qu’il fût totalement en accord sur certaines questions politiques, il y eut au sein du Parti, un groupe d’idéologues noiristes connus quelquefois sous l’appellation « d’ultranationalistes ». Les noiristes réclamaient de parler pour les masses contre l’élite, pour le pays contre le capital, et ils souscrivaient complètement au slogan du Parti National, à savoir ; « le plus grand bien au plus grand nombre ».
Janvier était un ferme défenseur de l’indépendance économique et politique d’Haïti et avait pourfendu les théories sur l’inégalité raciale qui eurent cours parmi les écrivains européens de cette période.
Ici, nous sommes concernés avec Janvier l’idéologue des ultras nationalistes et le porte-parole des paysans noirs. Salomon lui – même fut félicité pour avoir introduit une politique de distribution de terre… ce fut, d’après Janvier, leurs oppositions à cette mesure qui avaient amené les libéraux sous la direction de Boyer Bazelais à envahir Haïti dans les mois suivants.