La Migration haïtienne vers Cuba  par Matthew Casey

Casey est professeur assistant à University of Southern Mississippi. Ses publications inclurent un  article dans le  New West Indian Guide  et un chapitre du  livre dans la collection titrée Haiti and the Americas  /  Haïti et les Amériques  (2013).

Durant les  premières décennies du  vingtième siècle,  à peu près 200,000 Haïtiens  laissèrent  leurs foyers ruraux  pour [émigrer] vers l’est de Cuba. En 1913, le gouvernement cubain accorda aux  grandes compagnies  sucrières  la permission de recruter les  travailleurs à partir de la Caraïbe pour  les  récoltes annuelles. En fait, les Haïtiens  étaient déjà  entrés en petit nombre à Cuba avant même ce processus de légalisation. La migration [haïtienne] vers Cuba  s’accrut  après 1915.  Elle représentait alors la réponse haïtienne face aux transformations sociales, politiques et économiques apportées par l’occupation nord-américaine. La  majeure partie des migrants était des hommes, bien que 10, 000 femmes à peu près, firent le voyage.

La migration est une question contentieuse à Cuba. Plusieurs secteurs de la société cubaine se plaignirent en effet que les Haïtiens apportaient des maladies et des pratiques culturelles  primitives [comme le vodou] à Cuba, en même temps qu’ils  prenaient le travail des travailleurs natifs de [l’île]. Par contre, les compagnies de sucre, dont la plupart appartenaient totalement ou partiellement aux compagnies américaines,  dépendaient  largement du travail des immigrants.

A Cuba,  les travailleurs  haïtiens du sucre se joignirent  aux  divers autres travailleurs  ou forces de travail avec des gens  venus  d’Espagne, de Chine et de toute l’Amérique. Les administrateurs des compagnies  cherchèrent à diviser les travailleurs en fonction  [des critères] des lignes  de race, de langue, de nation pour éviter les grèves. Dans ces  systèmes de ségrégations, les Haïtiens furent normalement assignés  comme coupeurs de canne à sucre. Mais, dans la réalité, les  frontières entre les forces de travail  étaient beaucoup plus fluides. Quelques Haïtiens progressaient dans la  hiérarchie  du travail. Ils  étaient aussi en interactions  soutenues avec des personnes d’autres nationalités durant les heures de travail ou de loisirs. Quelques centaines d’Haïtiens éduqués vivaient dans les villes cubaines. A Santiago de Cuba, en 1926, ils formèrent  une branche de l’Union Patriotique, une organisation haïtienne opposée à l’occupation nord- américaine d’Haïti 

A la fin de la saison  sucrière annuelle,  quelques Haïtiens  retournaient  dans leurs foyers en Haïti.  Quand les salaires   étaient élevés, les  migrants de retour qui avaient réussi  louaient  ou achetaient   des  terres en Haïti.  Dans les années maigres, les migrants retournaient  appauvris. D’autres restaient   à Cuba après la  saison  sucrière.  Une quantité substantielle de ceux qui  y étaient   restés  trouvèrent du travail à Cuba dans la petite, mais  vigoureuse industrie caféière naissante.
    
En 1931, le  gouvernement cubain mit fin à l’émigration. Au cours des années 1930,  quelques 40, 000  Haïtiens furent déportés de force du sol cubain. Néanmoins, des milliers non déclarés restèrent  à Cuba où leurs descendants continuent à vivre.