La Gendarmerie et la Corvée  par Hans Schmidt

Un extrait de The United States Occupation of Haïti, 1915-1934/L’Occupation d’Haïti par les Etats-Unis, 1915-1934  de Schmidt (1971). Schmidt est un historien qui a enseigné à l’Université d’Etat de New York à New Paltz.

Le traité haïtiano-américain de septembre 1915 stipula que les États-Unis établiront et encadreront une gendarmerie haïtienne. La pratique de développer une force militaire autochtone contrôlée par les Américains avait déjà été employée par les États-Unis à Porto-Rico et à Cuba, et, pendant qu’on organisait la Gendarmerie en Haïti, leurs corollaires, Guardias, étaient en train d’être mises sur pied sous les auspices américains de l’autre côté de l’île en République Dominicaine ainsi qu’au Nicaragua. Ces gendarmeries devaient fonctionner comme des forces centralisées efficientes et non partisanes, assez puissantes pour assurer la continuité des régimes politiques pro-Américains et pour éliminer le problème de l’instabilité causée par les révolutions périodiques.

Alors que la machine politique était donc en train de se renforcer, les marines consolidaient simultanément l’efficacité militaire de la gendarmerie et de la brigade maritime par le biais d’un programme de construction de routes considérable.

N’ayant pas les fonds adéquats pour un vaste programme de construction de routes à cause de la pauvreté fiscale du gouvernement-client, les Américains remirent en vigueur une loi haïtienne de 1864, découverte par [un commandant de la marine américaine appelé] Smedly Butler, qui exigeait que les paysans travaillent sur les routes locales au lieu de payer les taxes sur la route. Ce système, connu sous le nom de corvée, déboucha sur la construction d’un réseau impressionnant de routes reliant les grandes villes, la plus grande réalisation fut celle d’une autoroute non pavée de 273 kilomètres entre Port-au-Prince et le centre nord du Cap Haïtien. Les paysans, cependant, n’appréciaient pas le travail forcé, et la résistance à la corvée se développa rapidement en une révolte généralisée…. L’utilisation des cordes pour attacher les ouvriers ensemble bouleversait particulièrement les paysans, car elle rappelait les légendes des bandes d’esclaves enchaînés pendant la colonisation française.