Price-Mars, les paysans et les élites par Hadassah St. Hubert (comité éditorial d’Une île lumineuse)

St. Hubert est une boursière McKnight pour ses études de doctorat dans le Département d’Histoire de l’Université de Miami.

Jean Price-Mars (1876-1969) fut médecin, enseignant et homme d’Etat. Cependant, on se souvient surtout de lui comme l’écrivain qui a contribué au mouvement Indigéniste, un mouvement littéraire qui fut lancé à la fin de 1920, en réponse directe à l’occupation américaine d’Haïti. Le mouvement demandait la création d’une littérature haïtienne « indigène ». Mais ce fut la publication  en 1928 de Ainsi parla l’Oncle de Price-Mars qui définit le mouvement.

Ainsi parla l’Oncle accusa les auteurs haïtiens et l’élite de bovarysme collectif, ce qui signifiait qu’ils se voyaient autres que ce qu’ils étaient. La littérature haïtienne imitait la littérature française et n’avait pas encore trouvé son âme indigène haïtienne. Price-Mars croyait que si les élites continuaient de se voir comme des « Français de couleur », la littérature qu’ils créaient souffrirait et serait vue comme une imitation. Price-Mars introduisit cette critique dans La  Vocation de l’élite (1919). Il soutenait l’idée qu’après une « période d’imitation assez laborieuse, la littérature [haïtienne] a finalement trouvé sa note originale aussi bien dans la satire de nos mœurs que dans l’expression de la troublante beauté de nos paysages ». (p. 185)

Ainsi parla l’Oncle, une étude des paysans haïtiens, valorisa les racines africaines dans la culture haïtienne. Price-Mars pensait que le chemin vers la création d’une littérature nationale était dans le folklore qu’Haïti avait hérité de l’Afrique. Le folklore haïtien avait un répertoire de traditions orales, de légendes, contes, chansons, devinettes, coutumes, observances, cérémonies et croyances qui offrent une empreinte personnelle, ou un chemin vers une culture nationale originale.

Ce chemin pouvait aussi être trouvé dans la langue créole parlée par les paysans et dans le vodou, que Price-Mars acceptait comme une religion. Price-Mars était conscient que plusieurs s’opposeraient à ses opinions sur le vodou mais il déclara que condamner le vodou serait pire qu’une injustice intellectuelle, ce serait une négation de l’intelligence.