La Famille Duvalier par Elizabeth Abbott
Abbott est associée de recherche principale à Trinity College de l’Université de Toronto. Elle a écrit de nombreux livres, y compris Sugar: A Bittersweet History / Sucre : Une Histoire aigre-douce (2009), Haiti: The Duvaliers and their Legacy / Haïti : les Duvalier et leur héritage (1988) et Haiti: A Shattered Nation /Haïti : une nation brisée (2011).
En 1971, un Papa Doc mourant décréta formellement que son fils, Jean-Claude, le succéderait comme président à vie, et un référendum factice ratifia la décision à 2,391.916 votes contre 0. Les affiches de Papa Doc avec sa main sur l’épaule ronde de son fils furent placardées partout, avec la légende « Je l’ai choisi ».
Le playboy de dix-neuf ans hérita d’une dictature qui fonctionnait sur la base de la terreur et de la répression institutionnalisées, avec une armée faible et une milice civile célèbre connue sous le nom de Tontons Macoutes, ainsi qu’une corruption systémique qui enrichit les favoris et acolytes mais garda des millions d’Haïtiens dans une pauvreté accablante. Sous Jean-Claude, un étudiant en droit réticent avec peu d’intérêt pour gouverner, le vrai dirigeant était sa mère, Simone Ovide Duvalier et ses acolytes. Terrifiée à l’idée d’être exilée si les Duvaliéristes perdaient leur contrôle sur Haïti, Simone joua un rôle actif dans le gouvernement, protégea ses associés et renforça son image en tant que Première Dame de la République à une myriade d’événements officiels que la presse soumise reporta sagement et photographia.
Le nouveau régime vanta son image de « libéralisation » mais comptait sur la même machine corrompue d’Etat et le pouvoir coercitif des Tontons Macoutes. Trois mille familles riches, puissantes et interconnectées contrôlaient toujours la société, les affaires et le commerce haïtiens pendant que les Duvalier et leurs officiels ratissaient des millions en provenance des revenus gouvernementaux, de pots de vin et de l’assistance étrangère détournée.
Puis, en 1979, un Jean-Claude furieux s’empara du contrôle du gouvernement après que sa mère et ses alliés s’opposèrent fermement à sa décision d’épouser Michèle Bennett, une divorcée à la peau claire avec deux fils et un père louche, narcotrafiquant. Après des noces de 3 millions de dollars listées dans le Livre Guinness des Records comme l’un des mariages les plus coûteux du monde, Michèle s’impliqua dans les affaires de l’Etat et, avec l’accord de Jean-Claude, nomma des officiels, domina les ministres et dirigea les prises de décision.
Les Duvalier, d’une cupidité stupéfiante, traitèrent l’Etat haïtien comme leur propriété privée. Ils détournèrent des centaines de millions de dollars du trésor et des revenus de l’Etat et instituèrent un nouveau règne de terreur qui musela les protestataires, remplit les prisons et gonfla la diaspora. En 1986, quand des soulèvements populaires et l’outrage international les forcèrent à s’enfuir, Haïti avait fait faillite.