Les Femmes dans les industries d’assemblage par Mireille Neptune Anglade (1945-2010)

Un extrait de L’Autre Moitié du développement à propos du travail des femmes en Haïti (1986) de Mireille Anglade. Anglade était une économiste féministe qui dénonça le traitement des ouvrières dans les usines d’assemblage en Haïti.

Le développement des industries de sous-traitance s’explique donc par la minimisation des coûts qu’elles peuvent y réaliser grâce à l’utilisation d’une main- d’œuvre en grande majorité féminine et surtout non syndiquée. 

En l’absence de chiffres officiels, nous considérons le nombre de 40.000 ouvriers comme le plus vraisemblable pour 1980.  En considérant un taux de féminisation de l’ordre de 70% comme le taux le plus probable (certains auteurs indiquent même un taux de l’ordre de 75%), la main-d’œuvre féminine ouvrière employée aurait été de 28,000 personnes en cette année. 

Le travail des femmes dans l’industrie est à relier à l’enrichissement que constituent d’abord les transferts de ce secteur aux autres secteurs internes, comme celui du commerce des biens manufacturés localement, et aux secteurs externes dont le rendement élevé du capital transnational se réalise par une ponction sévère dont le bout de la chaîne des prélèvements est le salaire d’exploitation des Haïtiennes.  A un autre niveau, les intermédiaires locaux que sont toutes les hiérarchies des entreprises ne recueilleront leurs substantiels profits et rémunérations de « commandeurs d’ateliers » que pour savoir maintenir le salaire de la main-d’œuvre féminine au niveau le plus bas ; faisant ainsi pression à la baisse sur l’ensemble  des salaires du secteur industriel ; enrichissement relatif aussi que celui des ouvriers par rapport aux ouvrières dans un ordre économique patriarcal qui veut, non seulement que les hommes gagnent plus du fait que les salaires de base les plus bas vont aux femmes (alors que ce sont les femmes les chefs de familles monoparentales) mais encore que les femmes travaillent directement pour les hommes qui en attendent entre autres choses, la partie domestique de leur « double journée ».  En somme le projet de développement industriel tel que conçu actuellement en est un d’exploitation sauvage, direct ou indirect, du travail des femmes.